# 3. Le rôle central des femmes dans la théorie du Chaos

La théorie du Chaos est un très bon exemple de l'impact que peut avoir l'informatique sur les autres sciences. Comme l'étude des systèmes chaotiques nécessite une bonne dose de calculs répétés, la théorie du chaos a vraiment pris son envol dans les années 60-70 avec l'introduction des premiers ordinateurs dans les laboratoires. Et l'un des premiers à décrire un système chaotique grâce à l'informatique fût Edward Lorenz (opens new window) alors qu'il étudiait les prévisions météorologiques.

Lorenz strange attractor Deux simulations du système chaotique de Lorenz avec seulement des petites différences dans les paramètres initiaux

L'histoire derrière cette découverte est bien connue. Pour chaque simulation météo, Lorenz affichait l'évolution de chaque paramètre en fonction du temps. Ces paramètres étaient utilisés par l'ordinateur avec une précision à 6 chiffres, mais n'étaient affichés qu'avec une précision à 3 chiffres. Quand Lorenz essaya de relancer une précédente simulation à partir des données affichées, quelque chose de bizarre se produisit. Non seulement ces petits changements dans les paramètres initiaux conduisirent à des résultats complétement différents, mais ces résultats, une fois visualisés, semblaient invariablement attirés autour d'une certaine forme, appelée plus tard un attracteur étrange. Ces découvertes furent publiées dans le célèbre papier Deterministic Nonperiodic Flow (opens new window). C'est aussi l'origine de l'effet papillon (opens new window) -- un évènement insignifiant qui a d'énormes conséquences -- même si, au départ, c'était en fait des ailes de mouettes:

One meteorologist remarked that if the theory were correct, one flap of a sea gull's wings would be enough to alter the course of the weather forever. The controversy has not yet been settled, but the most recent evidence seems to favor the sea gulls. Edward N. Lorenz
The predicatability of hydrodynamic flow (opens new window), 1963

Dernièrement cependant, Quantamagazine (opens new window) a publié une autre facette moins connue de cette histoire. Comme c'est souvent le cas dans la recherche, Lorenz n'a pas travaillé seul sur les simulations météo. Deux femmes ont été successivement engagées pour programmer et lancer ces simulations sur un ordinateur Royal McBee LGP-30: Ellen Fetter et Margaret Hamilton (opens new window). Et à cette époque, la programmation scientifique ne se résumait pas juste à du copié/collé de code python à partir de StackOverflow 😄

Royal McBee LGP-30 Le Royal McBee LGP-30 utilisé pour les simulations [1]

Another time, frustrated by all the things that had to be done to make another run after fixing an error, she devised a way to bypass the computer’s clunky debugging process. To Lorenz’s delight, Hamilton would take the paper tape that fed the machine, roll it out the length of the hallway, and edit the binary code with a sharp pencil. “I’d poke holes for ones, and I’d cover up with Scotch tape the others,” she said. “He just got a kick out of it.” The Hidden Heroines of Chaos (opens new window), Quantamagazine, 2018

Et oui ! C'est la même Margaret Hamilton à qui un NASA Space Act Award a été décerné pour le role critique joué par son système de prioritarisation des alarmes (opens new window) dans l'alunissage de la mission Apollo 11. Elle a même une figurine Lego a son effigie dans la boite Les femmes de la NASA (opens new window). Elle est également considérée comme l'une des personnes qui a inventé le terme « software engineering »:

Margaret Hamilton Margaret Hamilton [2]

When I first came up with the term, no one had heard of it before, at least in our world. It was an ongoing joke for a long time. They liked to kid me about my radical ideas. It was a memorable day when one of the most respected hardware gurus explained to everyone in a meeting that he agreed with me that the process of building software should also be considered an engineering discipline, just like with hardware. Not because of his acceptance of the new 'term' per se, but because we had earned his and the acceptance of the others in the room as being in an engineering field in its own right. Snyder, Lawrence and Henry, Ray Laura
Fluency7 with Information Technology (opens new window)

Source: Quantamagazine (opens new window) via Kottke (opens new window)


  1. Flickr album "Historic Computing Engines" by Jitze Couperus from Silicon Valley, California ↩︎

  2. Photograph of Margaret Hamilton taken by photographer Daphne W. Nichols for Hamilton Technologies, Inc ↩︎

Dernière mise à jour: 6/10/2021, 8:43:16 PM